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La période complexe que nous traversons du point de vue sanitaire nous conduit à des situations et des ressentis inédits : les souffrances que nous parvenions à dissimuler (à nous-mêmes ou aux autres), sont davantage mises au jour dans un tel contexte...


N’est-ce pas alors le bon moment pour nous occuper véritablement de nous ? Notre société, bien que fondée sur l’individualisme, nous autorise-t-elle vraiment à nous écouter et à parler de nous-mêmes ?


En effet, à côté des formes diverses de solidarité et de générosité qui -par la force des choses- ont donné à la société un nouvel élan ces derniers mois, la tendance profonde de nos comportements est bien davantage et depuis longtemps, tournée vers un certain genre d’individualisme et de repli narcissique. Chacun est sommé de mettre en oeuvre le maximum de ses potentialités dans tous les domaines pour montrer le meilleur de lui-même. Mais, est-ce pour un réel mieux-être intérieur, ou pour répondre aux injonctions sociales de performance et de réussite sociale ?


Car paradoxalement, cette logique de la performance, qui institue l’apparence comme vertu suprême et une compétition toujours plus grande entre les individus, semble ne pas pouvoir tenir compte des désirs réels de chacun. Bien plus, les faiblesses de chacun, pourtant constitutives de tout être humain, sont niées comme autant d’entraves à la réussite. Or, sauf à vivre dans le leurre et l’illusion, aucune existence humaine ne saurait être vécue de façon satisfaisante si la vérité profonde de chacun ne peut pas s’exprimer. Et lorsque les difficultés s’accumulent sans que l’on puisse les formuler, lorsque les désirs vrais d’accomplissement personnel sont contrariés ou ignorés, alors s’ensuivent nécessairement des symptômes qui viennent entraver le quotidien. Que ces symptômes se manifestent de façon purement physique ou directement psychique, il s’agit le plus souvent de troubles issus d’insatisfactions dont on a refusé la formulation. C’est en effet à ne pas se laisser dire, et parfois même à ne pas se laisser simplement reconnaître, que de telles insatisfactions se sédimentent en une souffrance permanente. Comment y remédier lorsqu’elle devient insupportable ?


On invoque le manque de temps, la pudeur, l’habitude de dépasser seul ses problèmes, pour ne pas s’occuper vraiment de ses souffrances... N’est-il pourtant pas crucial de consacrer un temps et un lieu nécessaires à une véritable attention à soi ?